L’inertie

Qu'est-ce que l'inertie ?
En bref

Parfois, devant une situation, les personnes autistes n’arrivent pas à trouver la meilleure manière d’agir ou la réponse correcte à donner. Face à cette situation, elles peuvent soudainement devenir incapables de bouger ou de parler. Ce n’est pas intentionnel, et cela ne signifie pas que la personne est désorientée. Elle comprend ce qui se passe, mais ne peut pas agir pour l’instant.

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L’inertie arrive lorsqu’une personne autiste est en surcharge et que cela cause une certaine confusion. La personne autiste en état d’inertie n’arrivera plus à bouger. Ce n’est pas que la personne ne peut pas bouger, c’est qu’elle n’arrive plus à choisir quel mouvement faire. Cela peut ressembler à une des réponses de stress connues sous le nom de « fight, flight, freeze » (combattre, fuir, figer), sans toutefois être identique.

L’inertie dans les situations sociales

Les personnes autistes ont une manière d’interpréter les interactions sociales qui leur est propre. Les personnes autistes ont toutes une manière de communiquer qui est différente des neurotypiques. Avec le temps, certaines personnes autistes arrivent à bien comprendre la manière dont les personnes allistes (non-autistes) communiquent.

Pour réussir à mieux communiquer, plusieurs personnes autistes apprennent à préparer longtemps à l’avance les paroles et les actions qu’elles peuvent utiliser dans des situations sociales. Souvent, les personnes dans cette situation vont hésiter entre plusieurs phrases ou actions lorsque c’est le moment de s’en servir. Si elles n’arrivent pas à trouver la manière de communiquer qui donnera le résultat voulu, elles peuvent tomber en inertie. C’est-à-dire qu’elles ne parlent plus et ne bougent plus. C’est pire si la personne autiste sait qu’il y aura des conséquences négatives si jamais elle ne trouve pas la « bonne » réponse, celle qui est « normale » ou « socialement acceptable ».

Imaginez devoir interagir avec un personnage non-joueur (PNJ) dans un jeu vidéo pour avancer au niveau suivant, tout en sachant que toutes les réponses possibles mènent à un « game over ». Cette perspective n’encourage pas à jouer.

Pour aller plus loin

L’état d’inertie, c’est une forme de dysfonction exécutive. Les fonctions exécutives, ce sont des processus complexes du cerveau qui permettent de poser la bonne action dans le bon contexte et de s’ajuster selon l’environnement. Lorsque la personne tombe en inertie, c’est qu’elle n’arrive plus du tout à effectuer les actions attendues selon la situation.

Important

Figer, c’est un signal que le corps envoie pour dire qu’il a détecté un danger.

La personne autiste dans cet état vit un grand stress si elle sait qu’il y a des conséquences négatives. Mais même si elle est stressée, la personne en état d’inertie continue à percevoir son corps aussi fort, sinon plus fort que d’habitude. Dans un environnement calme et avec des gens en qui la personne a confiance, cet état peut être vécu sans stress. Ça peut même être drôle d’y penser par la suite!

L’inertie sans le stress

Une personne autiste pourrait entrer en état d’inertie parce qu’elle n’arrive pas à trouver une bonne réponse à un problème de la vie quotidienne. Par exemple, comment entrer dans la maison sans mouiller le sol ni ses chaussettes lorsqu’on est couvert de neige ? Si on enlève les bottes tout de suite, les bas vont être mouillés, ça va être désagréable et il va y avoir des traces de petits bas mouillés partout. Mais on ne peut pas garder les bottes! Il va y avoir de l’eau partout.

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Dans cet exemple, le temps de choisir une action (entre sauver ses bas ou le plancher), il peut y avoir un délai. Et bien souvent, la neige aura le temps de fondre mouillant les pieds et le plancher avant que la personne puisse faire un choix.

Un phénomène similaire peut se passer chez les personnes TDAH puisqu’il s’agit d’un phénomène de dysfonction exécutive (voir la définition plus haut). En fait, l’inertie ressemble à une dysfonction exécutive version statue ! Et dans le cas de l’inertie, cela survient toujours dans un moment de surcharge émotionnel et/ou sensoriel.

L’inertie ou figer?

Les personnes autistes peuvent aussi avoir des réponses de stress ou suite à un trauma. Tous les humains, et même beaucoup d’autres animaux partagent les mêmes réponses de stress. Pour faire face à un danger, on peut: frapper (fight), fuir (flight) ou figer (freeze). De l’extérieur, les personnes en état d’inertie semblent figées. En fait, beaucoup de personnes le décriront de la même manière : « J’ai figé ». Cependant, les personnes qui figent face à un danger peuvent se déconnecter de leur corps pour se protéger. Toutes les personnes qui vivent un évènement traumatisant ou qui en ont déjà vécu un peuvent figer et se déconnecter de leur corps.

Les personnes en état d’inertie ne sont pas déconnectées : elles perçoivent leur corps, et leur esprit reste clair. Ces personnes ne trouvent simplement pas « la bonne réponse » pour poursuivre leurs activités. La personne en état d’inertie perçoit son environnement comme d’habitude. La personne figée qui vit un traumatisme aura l’impression que la réalité devient floue, ne percevra pas son corps comme avant et même, elle pourrait avoir l’impression d’être à l’extérieur de son corps.

Un jour, j’étais dans un local et à côté de moi il y avait une grande quantité de tables, pliées, en appui sur le mur. Tout doucement, elles se sont mises à glisser. Vraiment lentement. Tout ce que j’avais à faire était de placer ma main devant et j’aurais pu les retenir. Mais en regardant les tables glisser, je n’arrivais pas à déterminer la suite des mouvements, lesquels seraient les meilleurs à poser après avoir placé ma main. Donc, devant le doute, je n’ai rien fait et tout a fini par s’écrouler. Les gens autour n’ont pas compris mon manque de réaction.

Comme les personnes autistes ne perçoivent pas les informations sociales comme les personnes allistes (non-autistes), il est possible qu’une personne autiste fige devant une situation sociale qui ne semble pas traumatisante pour les autres.

Et si la personne déconnecte de son corps ?

Si l’on sent que l’on se déconnecte de son corps, ce n’est plus de l’inertie. Lorsque ça arrive, il est important d’aller chercher de l’aide auprès d’un psychologue. De plus, les personnes autistes, comme toutes les autres personnes, peuvent vivre des situations d’abus. Toutefois, il peut être plus difficile pour les personnes autistes de les identifier, ce qui augmente leur vulnérabilité face aux abus répétés.

Important

Figer, c’est un signal que le corps envoie pour dire qu’il a détecté un danger.

Dès que le corps reprend du mouvement, il est important d’aller chercher de l’aide d’un psychologue, d’un travailleur social ou d’un psychothérapeute. Ces professionnels peuvent aider à comprendre ce qui se passe et trouver des solutions pour être en sécurité.

Catherine Bouchard-Tremblay

Vulgarisatrice scientifique​