C'est quoi l'orthorexie ?En bref
L’orthorexie, c’est lorsqu’une personne veut tellement bien manger et y met tellement d’énergie et de temps que ça devient un problème. Parfois, une personne veut si fortement se nourrir à la perfection, qu’elle peut même refuser de s’alimenter si le repas n’est pas parfait selon elle.

Comment définir l’orthorexie ?
L’orthorexie touche les comportements alimentaires. C’est lorsqu’une personne veut bien manger au point de craindre de manger de mauvais aliments. Cela occupe une si grande place dans sa vie, que ça nuit à d’autres aspects importants de celle-ci.
Séparation stricte entre les « bons aliments » et les « mauvais aliments »
La personne passera une grande quantité de temps à faire des recherches sur l’alimentation, à choisir et planifier ses repas pour éviter les « mauvais aliments ». Les recherches sur l’alimentation pousseront la personne à refuser de manger de plus en plus d’aliments. Les aliments seront classés en deux catégories : les « bons aliments » et les « mauvais aliments ». La personne ne mangera que les bons aliments.
Des règles alimentaires sévères
Une personne vivant une période d’orthorexie se fixera plusieurs règles qui correspondent à ses croyances sur l’alimentation. Elle suivra ces règles même lorsqu’elles se contredisent entre elles. Dans certains cas, à force d’éviter les « mauvais aliments », la personne vivant une période d’orthorexie ne parviendra plus à avoir tous les nutriments dont elle a besoin.
Depuis quand bien manger est négatif?
Bien manger est toujours positif. Cependant, les personnes vivant une période d’orthorexie vivront plus de conséquences négatives dues à leurs comportements alimentaires que d’aspects positifs liés au fait de manger des aliments « parfaits ».
Le manque de nuance entre « bonne alimentation » et « mauvaise alimentation »
En premier lieu, il n’y a pas de bons et de mauvais aliments. Il n’y a que des aliments qui sont bons pour la santé dans certaines circonstances et moins dans d’autres. Par exemple, les nouilles instantanées ne sont pas « bonnes pour la santé » dans la majorité des circonstances. Mais dans un contexte de difficulté financière ou lorsque l’on manque de temps; c’est un bon moyen de se dépanner. Il vaut mieux parfois accepter de manger un repas accessible, mais imparfait que de ne pas manger du tout.
Une personne vivant une période d’orthorexie pourrait préférer ne pas manger plutôt que de manger un repas accessible, mais imparfait. Cependant, sauter un repas, ça aussi, ça a des conséquences néfastes sur la santé.

Impact social de l’orthorexie
De plus, les personnes vivant une période d’orthorexie vont éviter des évènements sociaux auprès de gens qu’ils souhaitent voir pour ne pas être soumis à la tentation d’enfreindre leurs règles. Cela peut mener à l’isolement. Certaines personnes peuvent devenir si rigides dans leurs règles qu’elles n’arrivent plus à voir des personnes manger de « mauvais aliments ». Cela peut pousser la personne vivant une période d’orthorexie à ne plus manger avec les autres.
Important
Une personne qui décrit ses préférences, choix et besoins alimentaires dans le but de s’assurer qu’il y a des aliments sécuritaires qu’elle peut manger avec plaisir dans un évènement social n’est pas en train de faire un jugement moral. Lui reprocher de le faire pourrait l’amener à s’isoler.
Les reproches liés à l’alimentation
La personne vivant une période d’orthorexie peut faire des commentaires désagréables aux autres personnes et exprimer publiquement un jugement lorsqu’elle voit une personne manger un « mauvais aliment ». Les personnes vivant une période d’orthorexie peuvent donc avoir des comportements méchants envers leur entourage alors qu’elles croient sincèrement « les encourager à mieux manger ». Si un de vos proches se comporte ainsi avec vous, vous pouvez mentionner que le respect des habitudes alimentaires se fait dans les deux sens. Vous respectez les choix particuliers de la personne, mais elle doit vous respecter en retour. Cependant, dans certains cas, la personne n’arrivera pas à se retenir, il faudra alors se rappeler que ce n’est pas personnel et que le désir de manger sainement occupe une trop grande place dans l’esprit de cette personne.
Autisme et interactions sociales
Les personnes autistes vivent déjà des défis reliés à leurs interactions sociales, donc si le fait d’être orthorexique leur complique encore plus l’accès à leur entourage, cela peut avoir un impact négatif encore plus grand que chez une personne non autiste.
Important
Tout le monde a le droit de vivre selon ses valeurs. Avoir un régime alimentaire qui permet de choisir des aliments qui concordent avec ses valeurs et croyances est tout à fait légitime. Ne pas choisir de régime alimentaire en particulier est tout à fait légitime. Il est important de respecter le choix des autres. Si un de vos proches vit avec l’orthorexie ou s’en approche, vous ne pouvez pas l’obliger à changer ses habitudes. Par contre, si sa santé est en danger, il faut agir pour ramener la personne vers un régime qui lui permet de se respecter tout en prenant soin d’elle.
L’énergie dépensée à gérer l’alimentation saine
Une personne vivant une période d’orthorexie va passer une grande quantité de temps à planifier ses repas et à les préparer. La personne pensera à sa planification de repas même lorsque ce n’est pas la tâche du moment. La personne aura des pensées intrusives liées à l’alimentation qui vont la déconcentrer dans ses activités quotidiennes. De plus, la personne pourra ressentir de la nervosité lorsqu’elle pense à l’alimentation.Risque d’anorexie
Finalement, une personne vivant une période d’orthorexie qui se fixe beaucoup de règles entourant le choix d’aliment « bon pour la santé » est à risque de devenir anorexique. Dans la culture actuelle, on pense souvent que les personnes très minces sont toujours en meilleure santé que les autres. Cette confusion peut faire en sorte qu’une personne vivant une période d’orthorexie finisse par craindre de prendre du poids au point de vivre une période d’anorexie.La différence entre régime alimentaire et orthorexie?
Un régime alimentaire est un ensemble de règles et d’astuces qui aide à décider quoi manger. Ces règles doivent proposer des aliments. Un régime alimentaire n’interdit pas de manger du dessert et de se faire plaisir. Cela indique comment le faire de manière suffisamment bonne pour son corps. Choisir un régime alimentaire n’est pas mauvais, c’est un choix de vie. Cependant, lorsqu’une personne met plus d’emphase sur ce qu’elle ne peut pas manger que sur ce qu’elle peut manger, la personne est en train de glisser vers l’orthorexie. Si la personne est inflexible sur ces règles au point de ne pas s’alimenter suffisamment ou d’imposer ces règles aux autres, cela devient de l’orthorexie.
Pour aller plus loin
Plusieurs pays proposent un régime alimentaire à leur population. Le Canada propose le « Guide alimentaire canadien » qui aide la population à choisir des aliments diversifié et sain classifiés en trois groupes alimentaires. Le Brésil propose un guide composé de 10 questions à se poser pour trouver les meilleurs repas disponibles dans sa communauté. Un bon régime alimentaire, ça aide à savoir quoi manger. Ça ne dit pas quoi ne pas manger !
Voir : Les guides alimentaires autour du monde
Lien avec l’autisme
Intérêts spécifiques et orthorexie
Plusieurs personnes autistes ont des intérêts spécifiques et sont très curieuses d’en apprendre davantage sur ces sujets. Les personnes autistes pourront donc passer des heures à faire des recherches, prendre des notes, classifier de l’information dans le but de tout connaitre de leur sujet préféré. L’alimentation est un intérêt spécifique commun. C’est tout à fait normal! Manger est essentiel à la vie. Il y a tant de choses à apprendre sur l’alimentation et la cuisine. Un intérêt spécifique sur l’alimentation peut être très utile à une personne autiste. Certains en feront leur carrière et deviendront cuisiniers, serveurs, nutritionnistes ou boulangers.
Cependant, les personnes autistes ont plusieurs traits qui les rendent vulnérables à développer des troubles du comportement alimentaire. Malheureusement, lorsqu’une personne autiste est vulnérable aux troubles du comportement alimentaire, l’intérêt spécifique sur l’alimentation peut aussi apporter des conséquences négatives et pousser la personne vers l’orthorexie.
Traits autistiques qui peuvent rendre vulnérable à l’orthorexie
- Préférence pour la routine
- Tendance à planifier toutes les actions du quotidien
- Rigidité dans les pensées
- Intérêt envers les recherches approfondies
- Plaisir à catégoriser et classer
- Sentiment d’avoir plus souvent raison que les autres
- Sentiment d’être meilleur pour faire des choix moraux
- Sentiment d’être meilleur pour faire des choix pragmatiques
Intérêt spécifique : environnement + alimentation
En plus d’une alimentation santé, certaines personnes voudront aussi avoir l’alimentation qui a le moins d’impact négatif possible sur l’environnement. Un intérêt spécifique relié à la crise climatique, ou la chute de la biodiversité amène à remettre en question beaucoup de comportements humains. Autant il est important de faire sa part pour l’environnement, autant il est souvent difficile de trouver des options alimentaires qui cochent toutes les cases de la protection de l’environnement : sans déchet, végétalien, local, sans OGM, biologique, etc.

S’il n’est pas toujours possible de manger uniquement des aliments « parfait » pour la santé du corps, il n’est pas possible non plus de manger des aliments parfaits pour la santé du climat et des écosystèmes surtout lorsque l’on est atypique. Cela n’est pas relié aux valeurs de la personne.
Choisir un régime alimentaire et être autiste
Goûts et textures alimentaires
Plusieurs personnes autistes ont des particularités sensorielles qui peuvent ajouter des contraintes aux choix d’un régime alimentaire. Par exemple, certaines personnes autistes peuvent avoir des sensibilités sensorielles aux textures et au goût des aliments. Les aliments transformés peuvent être d’un grand secours pour ces personnes puisque la texture est prévisible. Malheureusement, il est difficile de trouver des aliments transformés en vracs puisque l’emballage joue un rôle dans le maintien de la texture. Donc, il n’est pas toujours possible pour une personne autiste hypersensible de participer à un défi « zéro déchet ».
Coordination et alimentation
De plus, une personne autiste avec des difficultés de coordination pourrait avoir du mal à tout cuisiner elle-même. Cela peut rendre plus difficile le fait de suivre certains régimes alimentaires sains pour le corps, mais qui nécessitent de préparer ses repas soi-même.
Choix d’un régime alimentaire équilibré qui tient compte des besoins, des valeurs et des capacités
Il est important de faire des compromis entre les règles que fixe notre corps et les règles que l’on voudrait se fixer. Il n’est pas utile de se sentir coupable de ne pas pouvoir participer à tous les défis écologiques ou tous les défis santé.
La première règle à suivre pour s’assurer d’être en meilleure santé possible c’est d’être en vie. Manger en quantité suffisante est essentiel. C’est aussi essentiel pour avoir l’énergie pour passer à travers nos journées. Pour les personnes autistes qui ont du mal à manger suffisamment à cause de leurs particularités sensorielles, manger est un acte bon pour la santé, peu importe l’aliment.
Ne pas pouvoir participer à tous les défis de régimes alimentaires écologiques à cause de contraintes dues à l’autisme ou à un handicap montre que ces défis ont été conçus pour des personnes neurotypiques sans handicap. Rien n’empêche une personne autiste d’adapter ces défis à sa réalité et ses contraintes. C’est même une excellente idée puisque le but de ces défis est de créer un monde durable pour tous, donc pour les autistes aussi.
Références
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